Frontispice de la première édition du Code civil des Français, ou Code Napoléon (1804).
Exemplaire conservé à la Bibliothèque nationale de France, Paris.
Dès son arrivée au pouvoir, Bonaparte comprit en effet la nécessité de restaurer la société sur des bases d'ordre et de
discipline. La grande crise révolutionnaire avait jeté à bas quantité de principes. Sous la Convention, un Comité de législation
avait ébauché un projet de code. La période qui suivit Thermidor fut marquée par un terrible relâchement des mœurs. Tout était
donc à reprendre d'une main ferme.
En août 1800, le Premier Consul nomma une commission préparatoire où entrèrent trois éminents jurisconsultes : Tronchet,
Portalis, Bigot de Préameneu, qui, assistés du secrétaire général, Maleville, reçurent la charge de préparer une série de
projets de loi. Leurs textes furent discutés en Conseil d'Etat au cours de longs et laborieux débats. Les conseillers
accomplirent une immense tâche. Généralement présidés par Cambacérès, ils étaient talonnés par le Premier consul, qui
paraissait du reste souvent au Conseil (sur 190 séances il en présida 57), dont il étonnait les membres par la pertinence de
ses observations. Il savait écouter, il savait interroger. Avec son esprit clair il proposait aux juristes des solutions nettes, des
formules percutantes. Il avait été convenu que, lorsqu'un titre serait prêt, il serait étudié par le Tribunat, qui le soumettrait
ensuite au Corps législatif. Mais les tribuns formulèrent de si violentes critiques que Bonaparte décida de leur retirer les
textes.
De 1801 à 1804, trente six lois furent adoptées. Le 21 mars 1804, elles furent réunies sous le titre de Code civil des Français
qui prit, en 1807, le nom de Code Napoléon. Les législateurs s'étaient inspirés à la fois du droit romain, des anciennes
coutumes de France, des ordonnances des rois et des lois formulées par les grandes assemblées de la Révolution. Dans
l'ensemble, le Code s'attachait particulièrement à protéger la famille, mettant l'accent sur l'autorité maritale et paternelle; il
affirmait en outre avec force le droit de propriété, "droit fondamental sur lequel reposent toutes les institutions sociales",
expliquait Portalis. Bien qu'ayant abrogé beaucoup de lois de la période révolutionnaire, le Code conservait pourtant la plupart
des grandes conquêtes de 1789 : égalité entre tous les citoyens, laïcité de l'Etat, liberté de conscience, liberté de travail,
égalité entre les enfants légitimes en matière d'héritage et limitation pour les parents des libertés de tester, possibilité de
divorcer en certains cas précisés. Par sa clarté, par la vigueur de son style, le Code acquit un rayonnement mondial.